Et puis tout avait basculé.
Oui, c’était cliché, mais qu’est ce qu’il y pouvait lui ? Est ce qu’il avait voulu que cette soirée parfaite tourne au cauchemar éveillé ? Est ce qu’il avait demandé à ce que son meilleur ami ivre mort prenne le volant ? Est ce qu’il avait demandé aux dieux de faire pleurer les cieux ? Est ce qu’il avait souhaité voir le conducteur perdre contrôle du véhicule ?
Bien sûr que non.
Mais voilà, à l’issue de cette soirée comme il avait tant l’habitude d’en faire, ils étaient repartis, à quatre, cette bande d’inséparables dont la simple présence était synonyme de fête endiablée. Ils étaient repartis, toujours aussi ivres et défoncés qu’à l’ordinaire alors qu'eux-même passaient des journées entières à sensibiliser les plus jeunes sur les dangers de l’alcool et des stupéfiants. Sans doute s’étaient-ils jugés intouchables, peut-être avaient-il cru être tels Icare et s’étaient-ils brûlés en s’approchant de trop près du soleil. La voiture avait glissé sur la chaussée, l’adrénaline était montée alors que les rires se mêlaient aux cris, certains riant de la maladresse du chauffeur, d’autres se rendant compte de l’ampleur de ce qu’ils vivaient, dans ce véhicule qui bientôt serait le tombeau des rêves d’une jeunesse rattrapée par la dure réalité.
Comme le Titanic n’avait pu éviter l’iceberg, ils s’étaient pris l’arbre en plein fouet.
Les vitres avaient explosé, les crânes s’étaient heurtés, le sang avait fusé. Et le silence assourdissant avait crevé les tympans des quatre étudiants.
En une nuit, tout s’était effondré.
Haruko s’était brisé les deux jambes et sectionné les nerfs. Il ne pourrait plus jamais courir, il ne pouvait plus mener cette équipe, cette seconde famille, jusqu’à la victoire.
Haruko avait une immense plaie tout du long de son torse. Quelle marque voudrait d’un mannequin balafré ?
Haruko n’avait pas pu protéger sa propre petite amie de cet incident. Comment se regarder dans un miroir après ça ?
Haruko n’était plus rien. Oh bien sûr, tout ça ne lui ôtait pas son intelligence mais à quoi bon.
Après six longs mois de soins de médecine physique et de réadaptation, les kinés, les ergothérapeutes, les médecins, les infirmiers, tout ce beau monde, s’était réuni pour accepter cette triste conclusion : ils ne pouvaient rien pour lui.
Pourtant, ses parents s’étaient battus. Ils lui avaient payé la clinique la plus chère, ils avaient demandé l’avis des médecins les plus calés, ils avaient tout fait pour que leur seul et unique fils ne devienne pas un échec.
Mais rien n’y fit.
Haruko était à peine en mesure de relever ses pieds une fraction de seconde, à peine capable de contracter ces muscles qu’il ne sentait même plus. Il savait qu’il était foutu. Il savait qu’il n’y avait pas d’espoir, malgré toute la bonne volonté qu’il mettait dedans. Il le savait parce qu’il avait déjà vu des patients souffrir de cette même affection, il avait vu le désespoir dans leurs yeux alors que lui, intouchable et protégé par sa blouse blanche, leur annonçait la fatalité.
Les rôles s’étaient inversés et il était là, assis dans ce fauteuil qu’il ne quitterait désormais plus.
Sa copine l’a plaqué, sa carrière dans la mode est foutue en l’air, son internat n’est pas envisageable dans un fauteuil roulant. Sa vie entière venait de s’effondrer en quelques secondes seulement.
Et peu à peu, la déchéance se fit.
Lentement, son moral décline.
Lentement, sa motivation s’en va.
Lentement, la drogue vient pourrir ses veines.
Lentement, Haruko s'endette.
Il n’est plus que l’ombre de lui-même et même la plus chatoyante des lumières ne saurait lui faire retrouver son sourire.
Face claim : Byun Baekhyun (EXO)